Pratique Foncière Sous Fond D’insécurité En Côte D’Ivoire ; L’Exemple De Korhogo Dans L’ex Zone Sous Contrôle De La Rébellion Armée

Abstract

L’histoire foncière de la Côte d’Ivoire a connu d’importantes mutations, notamment avec l’arrivée des colonisateurs, qui ont modifié le régime foncier coutumier en instaurant la prééminence de l’État sur les terres vacantes. Ce monopole a perduré après l’indépendance avec la mise en place d’une politique foncière urbaine centralisée, favorisant le développement des infrastructures et du logement sous le contrôle exclusif de l’État. Toutefois, à partir des années 1980, la crise économique a conduit à une décentralisation progressive de la gestion foncière, impliquant les municipalités et des acteurs privés. Cette transition a été accentuée par la crise militaro-politique de 2002, qui a bouleversé l’administration foncière, particulièrement à Korhogo, où les autorités coutumières et les forces rebelles ont pris en charge l’urbanisation. Cette étude vise ainsi à analyser les logiques et les acteurs de la gestion foncière sous contrôle rebelle, ainsi que les défis de la normalisation foncière dans l’après-crise. L’approche méthodologique adoptée s’appuie sur des observations directes sur le terrain, l’analyse d’images satellitaires, des entretiens et une enquête de terrain.  Les résultats montrent que l’urbanisation désordonnée se caractérise par une occupation illégale importante des réserves foncières urbaines, fréquemment détournées au profit d’intérêts individuels. La crise a également favorisé l’émergence de nombreux conflits fonciers, notamment liés à la vente multiple de lots, à l’occupation illégale de réserves et aux différends entre villages. Aujourd’hui, la ville de Korhogo demeure une zone à forte tension foncière, où la régularisation des terres reste un défi majeur pour l’État et les collectivités locales.