Décrochage Scolaire et Maltraitance des Enfants dans les Familles Recomposées du District d’Abidjan

Abstract

Cet article propose d’étudier l’influence de l’abandon scolaire sur la maltraitance des enfants âgés de 10 à 15 ans dans les familles recomposées. La première hypothèse de l’étude stipule que la fréquentation de l’école, l’obtention des titres scolaires donne à l’enfant un statut socialement valorisé. En sortant prématurément et de manière volontaire de l’institution scolaire, l’enfant est vu  comme un raté, un bon à rien. Il perd le statut qui le valorisait. Peu investi, il subit des mauvais traitements de la part des adultes devant prendre soin de lui. La seconde hypothèse stipule que les beaux-enfants ou enfants non communs du couple recomposé, ne vivant pas avec leurs deux parents biologiques, étant orphelins ou ayant leur père et mère divorcés, bénéficient d’un filet protecteur plus faible, ce qui les expose beaucoup plus à la maltraitance, après leur sortie de l’école. Le cadre de référence théorique est constitué de l’approche écologique de la maltraitance et de la théorie économique du crime. Au plan méthodologique, l’étude documentaire, l’observation et les entretiens semi-directifs ont permis de recueillir des données auprès de l’échantillon d’enquête composé de 154 individus, durant 6 mois, du 4 janvier 2019 au 12 juin 2019. Cette étude a recouru aux analyses qualitatives et quantitatives. En termes de résultats, les données recueillies indiquent qu’environ 6 décrocheurs sur 10 maltraités sont des enfants nés de premiers lits contre 4 sur 10 vivant avec leurs deux parents de sang. A peu près, une moitié de ces enfants a connu le décrochage scolaire avant l’âge de 12 ans et l’autre entre 13 et 15 ans. Ayant un faible niveau d’instruction, ils vivent dans des familles dont la situation socio-économique n’est pas généralement aisée. Les difficiles conditions d’études, les rapports conflictuels à l’école, la dévalorisation de l’école à leurs yeux, leur engagement prématuré dans les activités génératrices de revenus, leurs faibles résultats scolaires et les grossesses précoces ont été à la base de leur départ de l’école. Dans la majorité des cas, ils sont peu estimés par leurs parents et beaux-parents avec qui ils entretiennent des rapports tendus, peu affectifs. Cette situation les expose aux sévices corporels, sexuels, à la maltraitance psychologique, à l’abandon ou à la négligence et à l’exploitation de leur main d’œuvre.